Jules Bénard
Un écrivain voyage dans La Réunion lontan !
D’aussi loin qu’il s’en souvienne, Jules Bénard a toujours aimé les livres. C’est donc tout naturellement qu’il s’est mis à l’écriture. Dans son dernier ouvrage, Souvenirs d’une enfance créole, il évoque ses jeunes années entre le sud et Saint-Denis. Un petit bijou plein d’humour qui se laisse lire, qui rappellera certainement de bons moments à certains et lèvera le voile sur une Réunion lontan que beaucoup ne connaissent pas.
D’où vous vient votre passion pour l’écriture ?
De plusieurs personnes qui ont su me transmettre cette passion. Je passais beaucoup de temps chez mes grands-parents à Saint-Joseph. Mon grand-père était un ancien instituteur de la coloniale, il aurait pu apprendre à lire à une vache si on lui avait demandé. Tous les deux m’ont formé au français et au calcul. Pour le calcul, ça n’a pas marché (rires). A l’école, j’ai eu des profs à l’ancienne, comme Jacques Lougnon, qu’on appelait le Vieux Tangue. Il a été un maître pour moi, au sens athénien du terme. Il enseignait la bonne pratique du français mais il formait aussi l’esprit. Et bien sûr, ma maman, Justy, qui était aussi enseignante.
Comment est née l’idée d’un livre sur vos souvenirs d’enfance ?
C’est celle de mon cousin, Pierrot Dupuy. Il m’a proposé de tenir une rubrique sur les souvenirs d’enfance sur son site dans le but de raconter aux gens comme se passait la vie autrefois. ça a tout de suite cartonné ! J’évoque un peu de tout, mon enfance à La Rivière, les vacances à Cilaos chez mes grands-parents maternels, à Saint-Joseph, évident, chez mes grands-parents paternels, ma scolarité au lycée Leconte de Lisle à Saint Denis… Je parle de choses qui se faisaient à l’époque et qui ont disparu. Comme la pêche au carabosse, un crustacé marron que l’on attrapait à la nuit tombante. Les plus expérimentés utilisaient les tripes de poulet, les battaient sur le reflux de l’eau pour faire monter les carabosses. On ne se rendait à Saint-Denis qu’en cas de nécessité, que les internes du lycée Leconte de Lisle ne pouvaient rentrer chez eux qu’une fois par mois. On prenait l’autorail, puis le car. À Saint-Louis, la fourgonnette de Monsieur Patel nous emmenait à la maison, à 19 heures, à temps pour le repas.
Vous publiez le premier tome de «Souvenirs d’une enfance créole». On imagine que d’autres sont prévus ?
Oui, tant que j’aurai des histoires à raconter. J’ai décidé de travailler avec L’éclipse du temps, une maison d’édition lancée par des jeunes qui doivent avoir la trentaine. A une époque où le livre est méprisé, je trouve ça courageux. J’ai voulu leur donner un coup de pouce.
Je suis gourmand et fin gourmet, alors j’ai écrit également des livres de recettes. Je peux aussi bien écrire sur l’histoire, sur des personnages qui ont marqué La Réunion ou encore les thrillers politico-policiers. Tiens, dans «Le nervi», qui s’inspire d’un sujet que j’ai couvert quand j’étais journaliste, j’ai réussi un tour de force : je ne donne la solution qu’à la dernière page.
Quels conseils donneriez-vous à ceux qui lancent dans l’écriture d’un roman ?
Lire, lire, lire… mais pas n’importe quoi ! Les livres grand public ne sont pas forcément à la portée de tout le monde. Prenez les trois tomes des Souvenirs d’enfance de Marcel Pagnol. On peut penser que c’est facile à écrire. Tu parles ! Ceux qui pensent être mauvais peuvent chercher les premiers manuscrits de Balzac. Ils sont plein de corrections…Il écrivait mal mais il savait si bien raconter les histoires.
Quel est le conseil qu’on vous a donné et que vous appliquez toujours ?
Si c’est mauvais, recommence ! Quand j’habitais à Madagascar, j’ai écrit un livre que j’ai envoyé à plusieurs éditeurs, qui m’ont répondu, très poliment, que mon texte n’était pas bon. Je me suis alors dit qu’il devait être mauvais, effectivement. Je l’ai transformé en livre pour adolescent, j’ai remporté mon premier concours du roman policier. Didier Verjel, le rédacteur en chef du Quotidien à l’époque m’a publié sous forme de feuilleton. J’ai accepté. Quelque temps plus tard, il m’a embauché comme journaliste.
(d'après une interview de Gabrielle Séry,
rédactrice en chef du magazine "JIR Télévision" )
Parmi les 40 ouvrages publiés par Jules Bénard, il faut mentionner particulièrement :
• Le Mémorial de La Réunion, (7 volumes, dont le dernier réalisé seul) 1978/1981. Avec Daniel Vaxelaire. Australe éditions.
• Dictionnaire du peuplement, L’épopée des 500 premiers Réunionnais, Azalées, 1995
• Sitarane, roman, Azalées, 1996
• Le nervi, roman, Orphie, 2005
• Robinson volontaire, météo des îles éparses (Guy Zitte), Orphie, 2010
• Petit glossaire créole, Azalées 1998, réédité 2012
• Bourbon pittoresque (suite d'Eugène Dayot), Azalées, 2012
• Mon canard l’est noir (nouvelles), Azalées, 2012
• La cuisine de Mémé Anéa, Azalées, 1997, réédité 2013
• Biographie Jean-Pierre Boyer, Azalées, 2013
• Si Cilaos m’était conté (avec Jack Gence), 2014
(dernière consultation le 19 octobre 2017)